Aurore ●● Son âme est un secret, sa vie est un mystère.

La télé est le divertissement le plus stupide que les moldus n’aient jamais inventé. Aurore zappe depuis maintenant 15 minutes sans trouver une chaine convenable. Sa sœur, Rose, est assise à côté d’elle et ne fait que bailler. C’est vrai qu’il est déjà tard, néanmoins les deux jumelles n’ont aucune envie d’aller dormir. Elle ne l’aurait pas su, de toute manière, après ce qu’il vient de se passer cette fin d’après-midi. C’est rare, très rare que des tensions surviennent dans la famille, et jamais encore il n’y en a régné autant qu’aujourd’hui. Dans la maison, cris et claquements de portes se sont succédés sans cesse, et continuent encore maintenant. Aurore et Rose se regardent, l’air grave, penaudes. Elles n’aiment pas voir leurs parents se déchirer ainsi, et se réfugient dans le salon, devant la télé, dans ces moments-là. Aurore ne se rappelle plus de la cause de cette dispute, mais se souvient parfaitement d’avoir sourit à sa sœur, essayant de la réconforter. Elle ne savait pas encore que ce sourire serait le dernier qu’elle ferait à jamais ainsi. Elle sait seulement que sa sœur est plus fragile qu’elle, et donc plus touchée par toute cette agitation. Alors, Aurore a envie d’aller jouer de piano pour elle. Elle n’est pas sans savoir que le son doux et mélodieux de cet instrument à pour effet d’apaiser sa sœur. Aurore se lève, fait signe à cette dernière de la suivre dans la salle de musique… C’est à cet instant que le drame survient.

Des coups secs et violents résonnent depuis le grand hall d’entré de la riche – car oui, cette famille a pour réputation de rouler sur l’or. Le père descend les marches quatre et quatre, mais ne va pas ouvrir. Au lieu de cela, il court dans le salon où il a deviné trouver ses filles réfugiées devant la télé, et leur crie « Montez !!! Enfermez-vous dans votre chambre et ne redescendez pas avant que quelqu’un vienne vous cherchez ! ». Sa voix est tremblante, très paniquée, mais sèche à la fois. Il crie fort pour étouffer les bruits sourds qui proviennent de la porte d’entrée. A présent, ce ne sont plus que des coups secs, mais aussi ce qu’Aurore prend pour des coups de hache que l’on abat contre la porte de bois. Est-ce ces bruits ou les la voix paniquée de leur père qui incitent les petites à monter précipitamment dans leur chambre ? Aurore n’en sait rien. Quoi qu’il en soit, à peine sont-elles arrivées dans leur chambre qu’un craquement sonore passe au-dessus de tout autre bruit. Aurore l’interprète aussitôt : la porte vient d’être défoncer. Et elle ne se trompe pas. Elle et Rose entendent alors des cris, des pleures, des coups de fusil, de hache, des brisements de verre, des choses que l’on frappe contre le sol de marbre. Elles entendent leur mère supplier les tueurs de leur laisser la vie sauve, à elles, Aurore et Rose. Leur Père crie des excuses, des « pitiés » ect. Tout cela, les jumelles l’entendent sans agir, sans bouger, sans crier. Elles ne font que se regarder, se serrer dans leurs petits bras en sanglotant et en espérant que tout se terminera bientôt.

(...)

Un bruit très aigu, mais légé transperça le silence du dortoir de l’orphelinat. Aurore s’était redressée sur son lit en proie à des tremblements incessants. Des gouttes de sueurs perlaient le long de ses tempes, ses yeux sortaient de leurs orbites, ses mains étaient complètement moites et, surtout, sa respiration était plus haletante que si elle venait de courir un marathon. Soudain, elle sentit une main se poser contre la sienne, toute tremblante, et elle sauta presque hors de son lit, effrayée.

Rose – Ce n’est que moi.

Aurore reconnut aussitôt la voix douce et calme de sa jumelle. Peu à peu, elle recouvra son propre calme habituelle, et ses tremblements cessèrent. Sa respiration devint de plus en plus régulière, et elle sentit sa sœur lui éponger le front, ce qui n’était pas une mauvaise idée. Après cet horrible cauchemar qui ne faisait en réalité que repasser le moment le plus sinistre et terrible de sa vie, la petite Aurore avait plus besoin de réconfort qu’autre chose. Elle regarda le beau visage de sa sœur, seulement éclairé par les rayons bleuâtre de la lune qui traversaient le mince rideau. Rien que de voir son visage certes triste mais remplit de sagesse lui redonnait espoir. Rose était la plus solitaire, la plus réservée d’entre elles.

Rose – C’est encore ce cauchemar ?

Elle acquiesça d’un simple signe de la tête. C’était une bête question, de toute façon. Elle le savait, le devinait parfaitement. Alors, Rose prit sa sœur dans ses bras et la serra contre elle. Aurore devinait qu’elle était chamboulée, si pas plus qu’elle, à chaque fois qu’elle faisait ce cauchemar. Qu’est-ce qu’elle s’en voulait de la réveiller ainsi, environs une fois par semaine. Essayer d’oublier quelque chose, c’est le meilleur moyen d’y repenser. Mais que pouvait-elle faire d’autre, à part essayer d’oublier ? Cette soirée avait marqué sa vie à jamais. De la vie calme, presque monotone en famille, aimées et choyées, elles étaient passées de la vie à l’orphelinat, misérable et manquant cruellement d’amour. L’écart était d’autant plus grand qu’elles aimaient sincèrement leurs parents, et qu’elles ne comprenaient pas exactement la cause de leur mort. Ce qui était certain, c’était que cela, ajouté à leur entrée soudaine à l’orphelinat, du jour au lendemain, les avaient traumatisées. Et bien qu’elles aient eu de la chance d’être tombées sur une charmante dame au nom de Eleonor qui les avait recueillies gentiment dans son orphelinat, il n’en restait pas moins un, et les deux jumelles ne se remirent jamais totalement de cet épisode aux allures dramatiques de leur vie.

Rose Jade & Aurore Chrystal. Deux prénoms à jolie résonance, allusion à la nature et des joyaux. Leurs parents devaient être soit des philosophes, soit des poètes pour appeler leurs filles de telle façon. Leur mère était musicienne, au violon, et cuisinière ; leur père était un mystère. Point. Non qu’il n’était pas un bon père, Aurore garde encore et toujours un bon souvenir de lui, mais… Etrange. Une bulle de secrets semblait planer tout autour de lui, qu’il prenait garde à ce que personne ne puisse l’atteindre. Mis à part ces quelques détails sur leurs parents, Rose et Aurore ignoraient tout d'eux et ne souhaitaient de toute façon pas faire de recherches à propos d’eux. Les secrets du père s’étaient envolés avec lui, l’amour de leur mère aussi, et les souvenirs des fillettes restaient enfouit au plus profond d’elle, n’attendant qu’une seule chose : disparaître. Si tout pouvait être aussi simple, la vie ne serait que pur bonheur. Malheureusement, il en va de soit que le destin n’est pas aussi indulgent.

La vie à l’orphelinat n’était pas dramatique, il fallait bien avouer que les deux fillettes auraient pu bien plus mal tomber. Néanmoins, elle regorgeait de tant de monotonie qu’Aurore aurait préféré encore vivre à la rue plutôt que dans cet endroit des plus calmes ; étant une fan des surprises. L’orphelinat ne comptait que très peu d’enfants, et tous avaient vécus des choses difficiles dans leur passé. En d’autres mots, cet orphelinat recueillait les enfants orphelins ou ayant été abandonnés. Autant dire que l’atmosphère qui y régnait n’était pas des plus joyeuse, ce qui ne semblait pas déranger trop Rose, contrairement à Aurore qui elle, avait une sainte horreur de la monotonie, de l’ennui et tout ce qui s’en suit. Au tempérament extraverti, ou plutôt sauvage, cette jeune fille était une petite insolente, froide et parfois violente. Elle ne s’accrochait, donnait sa confiance à personne, à l’exception de sa sœur, surtout parce qu’elle craignait énormément la déception. Comble de tout, cela ne l’empêchait pas d’aimer le contact avec les gens, pour pouvoir soit se divertir, soit faire ressortir toute la colère qui sommeillait en elle. Ce qui était un peu près pareil. En dépit tout de cela, sa sensibilité restait d’une grandeur phénoménal, à tel point qu’à tout moment elle pouvait refaire surface. Depuis la mort de ses parents, elle cherchait surtout un moyen pour oublier son passé, et autant vous dire que tous les moyens sont bons, dans ces cas là. Elle s’abandonnait parfois à des jeux dangereux, parfois à un rôle qui n’était pas le sien mais qu’elle jouait en vue de tromper l’autre sur elle. Elle était une énigme pour certains, une vraie petite garce pour d’autres, et cela ne la dérangeait point, mais au contraire l’amusait. Seule sa sœur pouvait se vanter la connaître parfaitement, savait repérer ses moments de comédienne, de tristesse ou de colère. Elle seule possédait un droit, une emprise sur elle, et obtenait du respect de sa part, ce qui tenait presque de l’impossible.

Rose avait beau apprécier le calme de l’orphelinat, qui lui permettait peut-être de mieux porter son deuil – car Aurore en avait conscience, il vint un jour où ce fut trop. Elles s’ennuyaient, et avaient ainsi beaucoup trop de temps libres qu’elles consacraient malgré elles à des pensées obscures. L’idée de fuguer sommeillait dans l’esprit d’Aurore depuis déjà un certain moment, et elle profita donc de cette journée de pur ennui pour en faire part à sa sœur qui accepta aussitôt. Dès le soir venu, elles se retrouvèrent aux grilles de l’orphelinat sans rencontrer personne, étant donné que Eleonor avait une totale confiance en ses mômes. Si elle savait…

Les rues de la petite ville d’Angleterre étaient d’une obscurité totale, mais pas pesante. Les jumelles marchaient côte à côté, d’un pas calme et mesuré. Aurore profitait de cette liberté un maximum, le sourire aux lèvres, des crépitements dans les yeux. Elle se demanda si sa sœur ressentait la même chose qu’elle, et voulu le lui demander. Aucun son ne sortit de sa bouche, comme si sa voix se perdait dans le creux de sa gorge, comme si une force invisible l’empêchait de dire mot. C’est à ce moment que la petite se rendit compte à quel point ses jambes, ses pieds, tous ses membres à vrai dire la faisaient souffrir. Et la douleur ne faisait que grandir de plus en plus, l’empêchait bientôt d’avancer, tandis que Rose qui ne remarquait pas la souffrance de sa sœur continuait, elle, d’avancer lentement. Aurore resta sur le trottoir, ses membres tremblants et sa gorge nouée l’empêchait de la prévenir quant à son état étrange. Sa jumelle le remarqua néanmoins bien vite et rebroussa chemin dans sa direction. Tout en s’approchant, elle murmurait son prénom. Rose avait compris directement que quelque chose n’allait pas, dans le cas contraire sa sœur lui répondrait ou du moins lui sourirait. Or, la souffrance et la douleur défiguraient son beau visage fin, rendaient ses traits dur et son regard suppliant. Puis, tout à coup, un cri aigu et strident retentit dans tout le quartier et la fillette s’écroula sur le sol en tremblants plus que jamais, se tortillant comme si elle avait été possédée par une force obscure. La vérité n’était en fait pas si éloignée que ça. La douleur était à présent si profonde qu’Aurore aurait préféré mourir plutôt que de devoir l’endurer, impuissante. De plus, ses membres se déformaient peu à peu, des poils poussaient le long de ses jambes, de sa poitrine, ses mains grossissaient à vue d’œil. Elle était en train de se transformer en un monstre. Pour employer les termes exacts, elle se mutait en lycan. A partir de maintenant, elle n’était plus Aurore, mais une bête immonde sans aucune pitié, sans aucun pouvoir humain sur elle. Pendant un instant, la bête sembla désemparé, puis se mit debout, posée sur ses deux pattes de derrière, et cria au clair de lune. Elle tenait du loup et du chien, mais surtout du monstre. Un monstre affamé qui ne cherchait plus qu’une chose : de la chair fraiche. La petite fille qui courait alors à quelques mètres d’elle apparut comme une proie facile, et le loup bondit à ses trousses, la rattrapa bientôt et lui donna un violent coup qui lui fit aussitôt perdre connaissance. La bête leva son immense patte une seconde fois, prêt à frapper à nouveau lorsque des lumières extrêmement éblouissantes le frappèrent de partout. Instinct de survie, le loup prit ses pattes à son coup et se dirigea droit vers la forêt la plus proche, tout en hurlant à son passage.

(…)

Lorsque Aurore reprit connaissance, elle était couchée au milieu d’une petite clairière. Un mal de tête terrible la fit gémir tandis qu’elle se redressait lentement et se tenait la tête entre les mains. Le soleil était éclatant, mais son esprit, lui, était très flou, complètement à l’ouest. La fillette était déboussolée et ne comprenait pas comment elle avait pu arriver là. Il lui fallut dix bonnes minutes pour se remémorer la fugue d’elle et Rose, et sa soudaine douleur qui l’avait fait trembler de tout son corps et l’avait plaquée au sol. La suite ne représentait qu’un trou noir. Aurore commença à marcher à travers les arbres pour trouver la sortie et la chance l’accompagnait car elle la trouva assez rapidement. Elle avait débouché sur une grande route qui devait la mener droit à l’orphelinat où elle espérait retrouver Rose qui saurait certainement lui expliquer les évènements qui lui faisait défaut. C’est alors que sur la route, elle passa devant l’hôpital où une ambulance venait de faire usage. Un mauvais pressentiment envahit la jeune fille qui y entra, tremblante. Son pressentiment ne l’avait pas trompé car aussitôt entrée que Eleonor la héla, en pleure, et lui parla très vite. Non pas de sa fugue, mais de sa sœur, d’un certain chien qui l’aurait attaqué dont on ne connaissait pas l’origine, de sa blessure au coup… Seuls quelques mots entrèrent dans l’esprit d’Aurore, qui n’attendait qu’une seule chose : voir sa jumelle.

Aurore – Je veux voire Rose. Tout de suite.

Son ton autoritaire étonna la directrice de l’orphelinat, mais celle-ci ne reprit pas et l’amena directement dans la chambre de Rose. Aurore s’approcha, tremblante, près de sœur qui était justement en train de reprendre connaissance.

Aurore – Rose ! Rose, tu m’entends ?

Aucune réponse. Aurore fut prise d’une panique immense. Et si elle ne se réveillait pas ? Et si elle venait à mourir ? Le médecin qui procédait à son réveil lui parla, la réconforta, mais rien ne su la calmer. Une larme perla le long de sa joue, elle observa un moment la blessure de Rose, au cou. Tout à coup, un flash lui traversa l’esprit. Aurore voyait sa sœur dans le noir, apeurée, tremblante, toute petite par rapport à elle. Elle se vit ensuite lui donner un coup puissant au cou, et sa sœur qui s’effondrer sur le sol, inconsciente. Elle vit enfin des lumières éblouissantes, puis revint à elle. Tout devint clair, à présent. Au du moins techniquement, car les pensées d’Aurore était encore très floue. C’était à cause d’elle, et elle seule que sa sœur était là à présent, sur ce lit d’hôpital. Elle était un monstre.

Rose – Au.. Aurore ?
Aurore – Ca va aller, je suis là Rosie.

Rose était vivante, quelle bonne nouvelle. Néanmoins, cela ne réconforta pas Aurore. Elle qui aimait les choses sortant de l’ordinaire, elle était servie. Rien ni personne ne pardonnerait son geste mortel. Rose allait certainement la haïr jusqu’à la fin de ses jours, ne plus savoir la regarder en face sans ressentir de la rancune. Elle méritait le pire châtiment qu’il existe : la solitude, à jamais. Pourtant, ce n’est pas un regard de haine que lui lança Rose, mais un regard remplit de tristesse accompagné d’un sourire futile. Aurore soutint ce regard, par un que se voulait réconfortant, mais qui n’était en fait que souffrance. Elle s’en voulait trop que pour arriver, cette fois, à jouer la comédie. Une main chaude et fragile à la fois lui caressa la joue, et son visage se tordit en une grimace de douleur. A partir de cet instant, elle comprit que sa sœur lui « pardonnait » son geste, et que ce secret ne serait révéler à personne. Les deux jumelles, en plus d’être unies par la force du sang et du cœur, l’étaient également par ce terrible secret.

(…)

La joie lorsque les fillette reçurent la lettre de Poudlard toute les deux est innommable. Le fait qu’elles restâmes ensemble restaient leur principal préoccupation. L’une sans l’autre, elles étaient complément perdues, c’était ainsi. La promesse qu’elles seraient toujours là l’une pour l’autre tenait évidemment toujours, et ce même si leur maison devait en venir à être à l’opposée l’une de l’autre, même si elles aimaient le même garçons, même si elles n’avaient pas les même amis ect. Les soirs de pleine lune, Rose tenait toujours à accompagner sa sœur, malgré les réticences de celle-ci dues à l’erreur passée. Heureusement, cela arrivait de moins en moins grâce au remède qu’elle parvenait parfois à dérober n’importe où dans Poudlard, lui permettant ainsi de vivre normalement. Bien que normalement est un mot bien grand pour cette jeune fille pleine de secrets et de mystères, qui ne manque jamais une occasion pour se faire remarquer. Car tous les moyens sont bons pour s’amuser, et ainsi oublier le passé.