need a shoot-Blake

La nuit était bien trop chaude, ils étouffaient sous le joug d'une chaleur lourde et presque anormale pour un mois d'Octobre en Ecosse. Ou peut-être était-ce l'effet de ces fumées grisâtres hallucinogènes qui leur montait à la tête. Ils n'étaient pas véritablement nombreux, réunis dans la salle sur demande en congrès élitiste pour une soirée regroupant une quinzaine de personnes. Avec les explosions ayant eu lieu une semaine plus tôt, la plupart n'était guère d'humeur à faire la fête, quand d'autres au contraire voulaient tout oublier en se plongeant dans les délices et les bas-fond de la débauche. Blake faisait partie de ceux-là, par ailleurs le Serpentard n'avait pas eu la main morte sur lesdites substances illicites cette nuit là qu'il revendait bien souvent, la perte de certains proches, et l'angoisse tenace de ne pas voir sa cousine aller mieux de jours en jours le poussaient à se retrancher dans ses excès. Un joint, puis un cachet, puis une piqûre... Un peu trop sans doute, même étalé sur de nombreuses heures espacées, cela suintait l'overdose à outrance, et pourtant le jeune homme au regard sombre était toujours debout. Absolumment inconscient de ce qu'il faisait voire pensait -si tant est qu'il y parvenait ce soir, mais rien n'était moins sûr- , l'esprit ailleurs et perdu dans les brumes hallucinogènes, à la fois présent et absent, ne s'écoutant pas même parler, pris au piège de l'emprise d'une héroïne pure s'infiltrant dans ses veines. Ici et là, des rires, des dépravés impudiques, quelques disputes qui ne duraient jamais longtemps également ; une fois l'euphorie des cachets retombée, le manque entrainait indéniablement une agressivité soudaine. Blake sentait des mains délicates frôler son torse, déboutonnant doucement sa chemise alors que des lèvres douces se logèrent dans son cou, entendant le carillon d'un rire léger de cette blonde peu farouche. Et le Serpentard se laissait faire, sans vraiment conserver ses esprits, sans même un sourire, les yeux clos et le soupir las, se laissant entrainer dans un tourbillon qui n'avait plus de fin. Elle dénoua sa cravate d'une main légère, posant ses lèvres dans un souffle brûlant sur le haut du torse du Serpentard, lui soufflant des mots qu'il ne comprit même pas... à moins qu'il ne les avait pas entendus. La jeune fille le poussa contre un mur avant de se caler contre lui, et enfin réactif aux caresses sensuelles de sa douce assaillante, Blake attrappa violement ses hanches fines qui arrachèrent à la blonde un rire éclatant. Ce genre de rire certifié pimbêche mangeuses d'hommes qu'il ne connaissait que trop... Et alors qu'elle jouait de ses mains avec audace, un jeune homme à la silhouette familière entra précipitament.

-- On se casse les gars, la ronde de nuit arrive !

Soudain, tout s'agita autour de lui, du moins cela lui paraissait être ainsi. En vérité, nombre de ses camarades se trouvaient dans son état, aussi ils ne marchèrent pas d'un pas aussi alerte qu'ils l'auraient voulu, malgré la précipitation alentour. De peur de se faire attrapper par un quelconque professeur ou préfet qui à la vue de ce bordel monumental et illégal leur infligerait sans doute des heures de colle à vie, la troupe de dépravés s'échappèrent par une autre porte afin de s'assurer de ne pas être pris en flagrant délit. Néanmoins la jeune blonde ne semblait s'en soucier, continuant de se coller audacieusement contre le Serpentard dans un sourire, alors même que le regard sombre de Blake se posait sur les fuyards, absent et ailleurs. C'est alors que le jeune homme en question venu les avertir attrapa la catin par le bras, la tirant vers lui afin de la faire stopper son jeu sensuel et loin d'être impudique.

-- Putain Sofia, on se casse j'ai dit.

La blonde ôta farouchement son bras de l'emprise du nouveau venu non sans lui lancer un regard noir et quelques insultes au visage, attrappant au passage la main de Blake comme pour l'entrainer avec elle. Mais aussitôt, le nouvel arrivant la poussa avec vigueur, l'intimant froidement de rejoindre son dortoir avant de se tourner vers Milton qui passa une main dans ses cheveux sombres non se sentir planer un peu trop. Les mots du jeune homme alerte parvinrent jusqu'à lui, mais le Serpentard n'en écouta que la moitié.

-- T'es bien allumé Blake, un peu plus tu te faisait violer par la blondasse, fit-il dans un rire moqueur, avant de reprendre son sérieux. Bon allez, sans déconner, je ressors pour faire diversion, histoire que tout le monde puisse tracer dans les dortoirs. Tu m'attends là Blake, t'es pas en état de rentrer seul... Tu m'entends ?

Agacé, le Serpentard hocha la tête non sans lui répondre quelque chose qu'il ne s'entendit pas dire, sentant la main amicale de son camarade tapoter sur son épaule avant de tourner les talons et de passer le seuil de la porte. Aussitôt, Blake se tourna et partit à son tour de la salle sur demande, marchant d'un pas assuré, le port de tête princier et l'oeil averti, ne laissant pas paraître l'état véritable dans lequel il était cependant. En toutes circonstances, il semblait que l'arrogance de Milton était telle qu'elle passait outre ce genre de choses paraissant être un détail. N'écoutant pas les dires de son ami, ne sachant d'ailleurs dès lors plus ce qu'il lui avait soufflé, Blake emprunta les longs couloirs de pierre, dans l'idée de prendre l'air. Il se sentait étouffer, et avait cette envie presque vitale d'aller happer de l'air frais au dehors. Après de longues minutes interminables lui semblant être des heures, le jeune homme finit par ouvrir une porte, sans vraiment savoir laquelle, laissant apparaître sur le seuil des toilettes délabrées et crasseuses ; un endroit qu'il ne connaissait que trop bien pour être le lieu de rendez-vous des débauchés de Poudlard. Reconnaissant tout de même les lieux, le ténébreux Milton s'avança vers les lavabos, lorsqu'une voix s'éleva alors.

‘’Qui est là?’’
-- Le grand méchant loup.

Un murmure suave s'échappa des lèvres de Blake comme il répondit dans un naturel ténébreux avant de se pencher au dessus des lavabos, ouvrant les robinets sans pour autant ne voir une seule goutte d'eau s'y échapper. Le jeune homme soupira, se souvenant miraculeusement que ces toilettes abandonnées ne fonctionnaient plus depuis des lustres, d'où la volonté des dépravés de l'amménager en un quartier général. Les mains posées sur la faïence, le regard de Blake accrocha le miroir crasseux et fissuré, fixant pensivement son propre reflet et ignorant jusqu'à la présence de la Poufsouffle. Une légère cicatrice sur la joue droite, une cravate dénouée, une chemise semi-déboutonnée laissant apparaître légèrement son tatouage ironiquement marqué d'un "I love romance" désuet, et enfin il darda le reflet de la Poufsouffle sans même un sourire ou une quelconque expression.

-- Tu es qui toi ?

Un ton sans doute un peu trop agressif dû à l'excès de ce venin hallucinogène s'infiltrant dans les veines , et il semblait que Blake ne savait plus ce qu'il disait, pas plus qu'il n'entrevoyait véritablement où il était vraiment.

Certes, il avait été violent dans ses propos ; l'effet de l'héroïne qui retombait, les ressentis d'un manque flagrant, cet état de semi-conscience qui jouait pour beaucoup aussi... Le jeune homme n'avait pas été des plus courtois en lançant sa question qui normalement banale se faisait agressive sous son sifflement de serpent alors qu'il toisait le reflet de la Poufsouffle assise à terre de ses yeux sombres. Pire encore, il supportait à peine le brouhaha qu'elle faisait et qui à lui, lui semblait infernal ; les substances hallucinogènes dont il était dépendant et qui quittaient son corps décuplaient sa mauvaise humeur légendaire ; Blake en redemandait encore, pour prolonger l'euphorie. Aussi, il ne tarda pas à remarquer les biens précieux de la jeune fille, son regard glissant sur la bouteille de vodka qu'elle venait de poser à terre, mais ce n'était pas tant d'alcool dont il avait besoin. De toutes façons, il lui fallait bien arrêter ces conneries un jour ou l'autre, il le savait, le sentait même, mais ne pouvait s'évertuer à couper court à ses dépendances ; c'était un pari difficile, ardu, et paraissant insurmontable. Le Serpentard ne releva pas la réplique taquine de la jeune Poufsouffle, par ailleurs c'était à peine s'il l'avait entendue, voire même véritablement comprise... Tout ce qui lui importait là maintenant, c'était de trouver un lit, une ou deux jolies filles allant de paire, et de prolonger la soirée dans les délices d'une luxure qui ne lui était pas interdite.... quoique Blake aurait mis sa main à couper que ce n'était pas pour cela qu'il était entré dans les toilettes abandonnées, ne se rappelant même plus de sa venue ici. Et sans même savoir pourquoi, il esquissa un sourire en coin à la jeune fille qui s'occupait de sa bouteille, présent et ailleurs, portant sur lui des effluves ténébreuses malgré cette lueur distincte de junkie invétéré brillant dans son regard.

''Moi je suis le petit chaperon jaune...haha!''
-- Alors laisse moi te manger.

De nouveau un sourire, se demandant même sous l'effet de la drogue diminuée si la demoiselle était comestible, alors même que mille idées perverses vint à emplir son esprit embrumé. Néanmoins le Serpentard oublia aussitôt sa réplique explicite, son regard fixant de nouveau le miroir sans jamais ciller, parti dans son voyage hallucinatoire alors même qu'il toisait son propre reflet. Mille pensées illogiques et décousues, l'impression étrange d'être aspiré dans un tourbillon si grisant, alors même que le Serpentard émit alors quelques rires légers sans même savoir pourquoi, son regard noisette glissant sur la faïence du lavabo. Dieu qu'il devait être pathétique, mais il s'en foutait complètement, par ailleurs il n'avait pas besoin du regard des autres pour exister, il était au-dessus de tout et de tout le monde... c'était en effet ce que le jeune homme pensait en l'instant, absolumment persuadé de ses songes peu modestes, puisque portant en lui cette sensation de pouvoir tout réussir, du moins bien plus qu'à l'accoutumé. Sobre et clean, le jeune Milton s'estimait déjà énormément, sans paraître narcissique ou stupide, mais sous l'effet de la drogue en prime il se sentait tout puissant, quand bien même il ne savait pas ce qu'il faisait. Lentement, le ténébreux jeune homme se releva, fouillant dès lors dans sa poche, avant d'en sortir un paquet de cigarettes.

''Eh je sais qui tu es...''

Pas de réponses, et pourtant le jeune homme gardait en lui une multitude de mots coincés en travers de la gorge, réponses plus illogiques les unes que les autres. Mais à vouloir tous sortir en même temps, il n'eut pas même le temps de réfléchir à une phrase potable, aussi son cerveau sembla juger bon de le faire taire plutôt que de le laisser balancer une phrase complètement décousue, sans queue ni tête. Le Serpentard renifla, le dos de sa main effleurant brièvement son nez -geste typique des cocaïnomans en manque - avant de finalement se hisser sur les lavabos pleins de poussière, la jambe pendant dans le vide et le dos posé contre le mur froid. Sans un mot donc, Blake alluma sa cigarette de sa baguette, laissant un nuage de fumée s'échapper de ses lèvres alors qu'il posait de nouveau ses yeux sur la jeune fille dont il ignorait jusqu'au prénom.

''Tu es BLake! PLusieurs filles dans les dortoirs parlent de toi...''
-- Exact princesse... et qu'est-ce qu'elles disent de moi ? Il souriait, absent et ailleurs, ne parlant déjà plus comme il le faisait à l'accoutumée, encore plus arrogant et insupportable que lorsqu'il demeurait propre sur lui, si cela était possible. Que je suis un salaud, un bon coup, un sale type... ? Et si je te prends là, tout de suite entre deux murs, tu le leur diras, et elles pourront rajouter que je suis un pervers qui prends de force les Poufsouffles dans les chiottes ? Blake haussa les épaules, perdant son sourire mais gardant son assurance, alors qu'il posa son regard sombre sur un point invisible du mur, tirant sur sa cigarette. Peut-être que ça les excite...

Aucune raison de s'étendre sur ce genre de sujet, et pourtant le Serpentard semblait trouver cela hilarant car déjà il fut secoué d'un nouveau rire léger et railleur alors qu'une autre bouffée de nicotine emplit ses poumons.

''Chuuuut chuuut petit prince je suis réveillé, c'était bon,bon comme un orgasme mais trop cour comme une palette de chocolat...''

Après quelques minutes paraissant interminables, la demoiselle se leva, mais Blake avait perdu la notion du temps. Il avait même perdu jusqu'aux bases élémentaires ; qui il était vraiment, ce qu'il faisait ici, avait-il un but dans sa vie, et oh gosh... elle n'était pas excitante, la petite jaune-et-noire noyée dans sa propre débauche ? Une question qui s'envola aussitôt, car encore sous l'effet de l'héroïne qui diminuait d'avantage, Blake ressentait ce manque qui l'affaiblissait, et se mit à fixer le mur gris tout en se sentant ailleurs. Il planait, était dans son monde, la cigarette au coin des lèvres et l'esprit embrumé. Qu'il était bon ne pas se poser de questions, ou du moins de ne pas se tourmenter pour en avoir les réponses, de ne pas se sentir soit-même mais de demeurer une personne au-dessous de tous les principes existants. Pour autant le manque le rendait agressif, et la petite junkie l'avait perçu, tout en conservant son sourire. Aussi elle se leva, sous l'oeil terne et vitreux du prince qui jeta sa cigarette à terre, à peine consumée, tout comme son âme. Lui n'avait vécu que pour les excès, pauvre paumé de la vie dont l'être disparaissait en cendres avant de se renouveler, il était la nicotine se faisant venin et dont on devenait dépendant ; on voulait s'en débarasser, et pourtant on ne pouvait s'en passer. Le Serpentard passa une main sur son front moite, un bad trip se faisant sentir à l'horizon qui se profilait comme un serpent souffreteux... Ses paupières se fermèrent un instant, avant de se rouvrir quelques secondes après , il ne se sentait pas bien, il avait ce mal-être profond, ce goût amer dans la bouche, l'envie de se taper quelques bitch perfect et de les détruire par la suite, l'envie de se faire diable salaud et pervers, l'envie de les détruire tous. Défaisant sa cravate qu'il jeta nonchalement à terre, Blake sentit sa respiration s'accélérer ; là où le junkie était persuadé avoir arrêté de respirer, il se sentait simplement étouffé par son propre mal-être, alors qu'en vérité l'oxygène s'infiltrait très bien dans ses poumons. Un passage à vide, comme souvent répertorié chez les junkie accro de son genre, piqué à l'héro et endormi à la morphine, plus de réalité, mais que de la douce illusion devenant amère lorsque les effets de la drogue se dissipaient. Et la poufsouffle se collant à lui n'arrangeait pas les choses, sentir sa chaleur contre lui amplifiait cette sensation d'étouffer. Et dieu qu'il avait l'envie de la repousser, son cerveau ne contrôlait plus rien et aucun geste ne vint pousser la junkie qui se mit à chanter. Mais le prince n'entendait rien, tout lui revenant comme un écho , il ressentait le néfaste de sa drogue dure envenimer son esprit comme il cherchait du regard quelque chose pour pallier son manque, n'importe quoi. Puis sans crier gare, une main frêle vint frôler sa joue, engouffrant entre ses lèvres un cachet qu'il avala aussitôt, se laissant guider par ce geste qu'il pensait salvateur, ne sachant pas vraiment ce qu'il faisait là .

''Les étoiles veulent que je te donne ça...''
-- Elles sont si lunatiques...

Un sourire en coin pour une parole qu'il ne comprenait même pas, et qui de toutes évidences étaient loin de demeurer cohérentes et logiques. Il ne répondait plus de raison, il sentait son agressivité grandir au même titre que cette chaleur étouffante. Il avait soif, atrocement soif, aussi il lui fallait chercher les robinets du regard... Mais le Serpentard ne bougea pas, mal en point et sonné, au bord d'une tachycardie grandiose et princière, il ne controlait plus rien... jusqu'à ce que la princesse ne le force à boire à la bouteille, quelque chose d'amer et de trop sec, lui arrachant une moue d'abord réprobatrice, il finit par apprécier le liquide lui mettant la gorge en feu. N'y tenant plus, le jeune homme alla glisser contre le mur, s'asseyant sur le sol crasseux, la chemise défaite, la cravate à terre, l'esprit loin, si loin de ces toilettes poisseuses et sinistres... Il passa une main dans ses cheveux d'ébène décoiffés, plaquant alors sa tête contre sa paroi... L'ecstasy ne faisait pas encore tout à fait effet, mais les derniers spasmes de l'héroïne secouaient son corps fatigué... Qu'il était perdu, le sombre prince dont le coeur au bord des lèvres murmuraient un trouble certain... Elle et lui, deux paumés junkies ne parvenant pas à se faire comprendre, avaient en fait tellement en commun. Blake tourna la tête vers la demoiselle dans un bref sourire, alors que sa voix s'élevait dans un murmure suave.

-- Je t'aime, tu sais...

Un léger rire s'échappa de ses lèvres alors qu'il tourna la tête, son regard noisette posé sur la bouteille de vodka qui ne voulait pas venir jusqu'à lui... Fuck off, tant pis pour elle si elle ne voulait pas se faire chopper par Blake Milton-White.

-- Fuck off... fut son dernier murmure suave mais enragé.

Un baiser sage posé au coin des lèvres, un peu de douceur dans cette paranoïa ecstasiale, les enfants de la génération chimique s'aimaient toujours intensément avant de se battre férocement pour la dernière traînée de poudre... C'était la sensation de bien être explosive et surhumaine qui montait encore et encore, avant de fatalement redescendre et de vous asséner le coup de grâce : la personne qui était devenue votre âme soeur sous l'effet chimique demeurait celle qui peut-être, vous poignarderait dans le dos, délires illusoires d'une paranoïa installée... Puis on ne se souvenait plus de rien, se demandant qui on était et ce qui s'était passé, et en l'occurrence le Serpentard commençait déjà à sentir sa mémoire défaillir. Il savait juste qu'il était là, avec cette Poufsouffle devenue sa meilleure amie, quelque part dans un château, peut-être était-il prince, peut-être était-il roi, dans tous les cas il ne semblait avoir aucune autorité sur la bouteille de vodka... qui finit par s'avancer d'elle-même vers lui. Ne voyant pas l'amère réalité, Blake avait vu dans le geste de Celestia consistant à pousser gentiment ladite bouteille vers lui, une manifestation du grand esprit vodka venu de lui même vers le Serpentard, qui l'attrapa alors d'un geste sec et tremblotant. Le port de tête vacillant légèrement, le regard éteint, l'esprit loin, porté par ce voyage hallucinogène, il toisa alors Celestia qui s'était levée, rayonnante et chantonante. Elle apparaissait soudain aux yeux du Serpentard comme une étoile ; envoûtante, brillante de mille feu, tournoyant un peu trop vite à lui en donner le tournis, mais terriblement captivante.

''Te dirais d'aller observer le ciel dehors?''
-- Le monde est à moi.

Etrange réponse qui signifiait un grand et enthousiaste "oui", dans tous les cas le Serpentard se demandait si son âme soeur du moment n'avait pas lu dans ses pensées, car si cette dernière ne lui avait pas fait cette proposition, Blake le lui aurait demandé de lui-même. Peut-être était-elle voyante, peut-être qu'elle lisait toutes ses pensées, et à cette idée le Serpentard toisa Celestia dans les yeux, la mettant au défi de le décrypter une nouvelle fois et de voir qu'il pensait à... rien ? Le jeune homme finit par rire, avant de lever sa main vers la douce afin qu'elle l'aide à se remettre sur pied, et ce fut non sans difficulté que Blake parvint à se remettre debout, la bouteille de vodka à la main dont il avait déjà renversé le tiers du contenu à terre. Blake soupira, se retournant d'un geste sec, il avisa alors les lieux pourvus seulement de minuscules fenêtres... Celestia passerait peut-être, après tout une étoile, n'était-ce pas tout petit... ou immensément immense ? Le Serpentard murmura quelques râlements brodés d'injures en islandais, ressemblant à des "hypjà dàs" embrumés, son esprit vacillant tentant de trouver des solutions toutes plus farfelues les unes que les autres. Portant la bouteille à ses lèvres, le jeune homme en avala une gorgée avant de se tourner vers Celestia. Si cette dernière était une étoile, fatalement elle retrouverait la route menant au ciel, mais pouvait-il décemment suivre un astre dans les hauts lieux astraux s'il n'était que simple mortel ? Une idée germa alors dans l'esprit du Serpentard, alors qu'il attrapa la Poufsouffle par la hanche, pressant son corps contre le sien avant de la fixer droit dans les yeux dans ce sourire pernicieux, à la fois absent et pervers.

-- Je te suis, mais tu devras nous marier... Suis moi.

"Je te suis", précédant un "suis moi", le Serpentard se perdait en logique et gagnait en affabulation alors que son corps jusque là fatigué semblait gagner en entrain et en dynamisme. Peu à peu il se sentait revivre, avec cette envie de rire, de s'exprimer, de basculer dans l'excès, de se finir la bouteille de vodka quand bien même le goût amer de l'alcool trop sec brûlait sa gorge, quitte à crever d'une overdose... Ce qui fatalement allait finir par arriver. Prenant la main de son âme soeur, il la tira de force vers lui alors qu'il quittait les lieux, parcourant les couloirs sombres mais frais, ses pas le menant vers une tour aux escaliers interminables. Il devait sans doute être le Roi de ce château, pour en connaître par coeur les moindres recoins, du moins c'était alors ce que le Serpentard se mit à croire. Il était Prince, et son étoile l'amènerait vers d'autres cieux, jeu délicieux qui finirait sans doute par devenir dangereux... Et enfin, les deux junkies parvinrent au sommet de la tour à la terrasse ouverte, la brise balayant leur visage, le ciel piqueté d'étoiles planté au-dessus de leur tête venant les narguer alors. Et Blake, orgueilleux dans l'extrême, voulant prouver qu'il était roi, alla se poster près du rebord, près, si près qu'un simple vent trop fort pourrait le faire chuter... Mais dans l'esprit du jeune homme embraisé chimiquement, il ne pouvait rien lui arriver. Il volerait, ou atterrirait avec douceur, car un roi ne mourrait pas, jamais. Alors le Serpentard tendit les bras, ne lâchant toujours pas sa bouteille de vodka, il ferma ses yeux noisettes, respirant l'air pur tout en se sentant immensément ailleurs. Puis ses yeux se rouvrirent sur l'immensité sombre du parc, le junkie était plongé dès lors dans son voyage hallucinogène, persuadé en cet instant précis qu'il faisait partie de ces astres, et les sombres ténèbres à ses pieds n'était que le ciel qu'il dominait, alors même qu'il ne s'agissait que d'un parc plongé dans les ténèbres.

-- Je vous hais !

Une haine gueulée à la face du monde, si vraie, sortant de ses tripes et de son âme, le Serpentard l'avait crié à tous du haut de son piedestal, avant qu'il ne se mette à rire légèrement, se sentant si léger d'avoir expié cette vérité trop lourde. Puis il se tourna vers Celestia, sans pour autant bouger de son rebord vertigineux.

-- Maintenant mon étoile, marie-nous, fit-il dans un sourire en coin.

Visiblement amusé par la situation, Blake ne comprenait toujours pas qu'il se trouvait dangereusement sur une des hautes tours de l'école, pas plus qu'il allait pour faire le saut de l'ange grâce à Celestia, et ce sur sa simple demande. Il était par ailleurs prêt, le sombre prince, à faire le grand saut simplement pour aller rejoindre ses délires hallucinogènes lui brouillant le cerveau mais qu'il semblait pourtant trouver si amusant. Prêt à faire le grand pas, prêt à rejoindre le ciel pour darder les autres d'encore plus haut, pour un peu, le Serpentard aurait sauté de lui-même, si sa femme avait été contre le rite qu'il lui demandait. Mais bien au contraire, Celestia s'était avancée, guillerette et enthousiaste, tout autant que Blake qui ne comprenait pas l'ampleur du danger qu'ils étaient pour eux-même. Et fort heureusement pour lui, une voix comme venue du ciel surgit de nulle part ; un Alexander paniqué vint à les tirer vers lui, sous le rire du Serpentard qui semblait trouver ça visiblement hilarant, sans savoir pourquoi. Ne comprenant pas ce que lui soufflait son ami aux prunelles angoissées, Blake ne l'écoutait même plus, son regard tourné vers celle qu'il pensait être sa femme, la toisant comme si elle était son âme soeur, son amour, son tout, sa liberté. Il lui offrit un sourire tendre, partagé entre l'amusement et la fatigue, car son corps déjà lassé de toutes ces substances ingurgitées tout au long de la soirée peinait à tenir encore, malgré l'euphorie lui gagnant les sangs. Pour autant, Blake ne comprit pas plus ce que racontait la Poufsouffle, néanmoins dans l'esprit du Serpentard cela devait être diablement amusant car il fut secoué d'un rire léger avant de baisser son regard au sol dans un soupir fatigué, se laissant entrainer par Alexander le poussant alors vers la sortie. Néanmoins, soudain, l'ami de Milton se stoppa, claquant sa langue contre le palais dans un râlement exaspéré, avisant alors Celestia d'une oeillade agacée comme celle-ci finit par balancer son sous-vêtement du haut de la tour. Peu importait, si elle voulait se la jouer strip teaseuse maladroite, c'était son problème, mais visiblement Alexander n'appréciait guère le fait d'avoir à s'occuper d'une autre junkie esseulée.

-- Bon tu suis ?
''Je veux une cigarette....''
-- Qu'est-ce que j'en ai à foutre, putain...
-- Ne sois pas si dur caporal, elle va te pousser.
-- Il manquerait plus que ça... Bordel Blake je t'avais dit de pas bouger ! T'écoutes les autres des fois ?
-- Jamais. Ils sont si... ennuyeux.
-- Et regarde moi celle-là, vous êtes complètement shootés !

Alexander se retourna sur Celestia dont les pieds se suspendaient déjà dans le vide, scandant alors vivement d'une voix neutre qu'elle voulait une cigarette. Prêt à jouer les chevaliers servants et à lui accorder ce qu'elle souhaitait -si encore il se souvenait où il avait pu ranger son paquet de Lucky qui dormait tranquillemet dans sa poche - Blake fit un pas mais fut bientot stoppé par la main ferme d'Alexander dont la patience semblait à bout. Enfin, le Serpentard se pencha à l'oreille de son ami, avant de lui murmurer d'une voix mutine des paroles qui n'avaient plus grande cohérence.

-- Prends une photo...

Soufflant ses paroles qu'il pensait véritablement logiques à l'oreille d'Alexander, Blake se redressa alors que son ami véritablement exaspéré ne semblait plus où en donner de la tête. Poussant désespérement une dernière fois Milton dans le dos afin de le forcer à prendre la porte, il demeurait bien résigné à laisser la demoiselle seule, partagé néanmoins entre l'agacement et le remord. Cependant il devait se rendre à l'évidence ; jamais il ne pourrait se trainer de force deux junkies derrière lui, aussi Alexander se tourna vers le Serpentard au regard étrangement éteint, lui faisant signe de passer. Aussitôt le junkie s'avança, comme sachant déjà où lui mènerait ses pas, et se postant enfin auprès de Celestia, Milton lui tendit la main.

-- Viens princesse, on va faire un tour dans ma chambre.

Sourire mutin de la part du jeune drogué voulant inviter l'étoile à dormir en compagnie, quand Alexander leva son regard vers le ciel avec exaspération.